L'HUMANITE.FR Vendredi 30 MAI 2014


Eugénie Barbezat
Vendredi, 30 Mai, 2014
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En réintégrant dans ses fonctions l'équipe du cinéma le Méliès évincée par Dominique Voynet, la nouvelle municipalité affirme un engagement fort en termes de politique culturelle, de recherche cinématographique et d'éducation à l'image.
Les "trois du Méliès" sont de retour.  La nouvelle, enfin officielle, est tombée. Pour Stéphane, Marie et Maud, c’est un véritable cauchemar auquel, en tenant sa promesse de campagne, le nouveau maire de Montreuil vient de mettre un terme. "Une sale histoire" qui finit bien ! A Montreuil, en Seine Saint Denis, une équipe de passionnés va continuer à promouvoir le cinéma comme instrument nécessaire et précieux de culture de savoir et d'émancipation, pour tous.
Rappel des faits
Aux yeux de la nouvelle maire, élue en 2008, Stéphane Goudet, le directeur artistique et de la programmation du Méliès a trois principaux défauts : avoir porté le projet du nouveau Méliès, être catalogué comme proche de Jean-Pierre Brard et être un peu trop souvent cité dans les médias.
Stéphane Goudet a en effet convaincu l’ancien maire de  porter le projet du nouveau Méliès, un cinéma de 6 salles, dont le déménagement est prévu dans de nouveaux locaux au cœur du quartier rénové de la Mairie. Cela donna lieu à un combat acharné contre les mastodontes UGC et MK2, pour que le cinéma de Montreuil reste municipal* et indépendant.Or, cela n’a pas eu l’heur de plaire à l’ex maire (EELV) de Montreuil sous bois (93) qui aurait asséné : « Pourquoi laisser au secteur public ce que le privé sait faire en moins cher et en mieux.» Pour Stéphane Goudet : « Il s’agit ici d’une opposition idéologique, la position de D. Voynet étant à la « privatisation » d’un cinéma qui,  à nos yeux relève du secteur public de par les missions d’éducation à l’image et de recherche qu’il assure.»
Il se trouve aussi que la passion pour le cinéma de son directeur étant contagieuse, le Méliès a très vite été connu et reconnu par le public, et aussi par un grand nombre de réalisateurs et de personnalités du 7e art. Cela se traduisait par des partenariats, des festivals, des rencontres, des débats, le tout relayé assez largement par la presse… Cette "éditorialisation" forte, le petit cinéma niché au milieu d’un centre commercial du 9-3 la doit à son directeur artistique, qui incarne ce lieu autant qu’il l’habite. Une attitude jugée « arrogante » par l’élue verte qui va faire de son limogeage une affaire personnelle.
Commence alors une véritable guerre, durant laquelle vont être employées pour abattre Stéphane Goudet les armes les plus douteuses : noyautage de l’équipe de salariés du cinéma, délation calomnieuse, multiplication des enquêtes administratives et des contrôles on ne peut plus pointilleux, harcèlement…
Aucune des enquêtes n’aboutira à quelque condamnation que ce soit.** Néanmoins, fin 2012, Stéphane Goudet finira par être licencié au motif de ses "épanchements"*** sur son affaire dans les réseaux sociaux. Ses deux principales collaboratrices sont mutées dans d’autres services de la ville. Benedicte, la programmatrice, n'est pas reconduite, mais retrouve un poste, quelques mois plus tard au sein de la Société des Réalisateurs de Films.
Mobilisations
Pétitions, mobilisation des spectateurs qui se regroupent en association pour défendre leur cinéma. Soutien appuyé de nombreux cinéastes, qui avaient l’habitude de venir rencontrer les spectateurs du Méliès. Solveig Anspach, Dominique Cabrera, Robert Guédiguian, Dominik Moll, Gérard Mordillat, Chantal Richard, Bertrand Tavernier, Jean-Pierre Thorn et bien d’autres interpellent la mairie pour obtenir des explications et défendre Stéphane Goudet contre les accusations fantaisistes auxquelles il doit faire face. Les candidats aux élections municipales sont appelés à se prononcer. Tous, sauf les verts promettent de redonner son poste à Stéphane Goudet s’ils sont élus ! Pendant des mois, la ville bruisse de cette affaire, qui a été un des enjeux centraux de la campagne pour les élections municipales, l’effondrement des entrées (qui ont chuté de 70 000 en 2013, soit plus de 300 000 euros de manque à gagner), faisant apparaitre l’éviction de l’ancienne équipe comme une perte  "objective" pour la commune.

Heureux dénouement
Le 7 Mai dernier, lors du premier Méliès Éphémère d’après élections municipales, Alexie Lorca, l’adjointe (socialiste) à la culture de la Mairie de Montreuil est venue annoncer la réintégration de l'équipe du cinéma, conformément aux promesses de campagne de Patrick Bessac (voir vidéo ci-dessous). Le retour des trois personnes en question, à leur poste et avec l’intégralité pleine et entière de leurs anciennes attributions est imminent. « Les deux filles reprennent lundi », confie Stéphane Goudet, dont le cas, légèrement plus complexe administrativement et objet d’un ultime bras de fer au sein de la nouvelle majorité municipale, a finalement été tranché par une décision qui le remplit de joie et le conforte dans la mission qu’il va s’atteler à poursuivre dans les semaines à venir. « Je suis vraiment très heureux, j’ai appris la confirmation de cette bonne nouvelle durant le festival de Cannes, où, du coup, j’ai trouvé tous les films formidables », plaisante aujourd’hui celui qui a toujours été soutenu par les cinéastes fidèles du lieu et aussi par les spectateurs qui à travers l’association  Renc'art au Melies et le Collectif Indépendant des spectateurs du Melies lui ont permis de ne pas renoncer à se battre, même si d’emblée, le combat semblait inégal.  
Avanti !
« Maintenant que nous avons retrouvé nos fonctions et notre honneur, l’important c’est de poursuivre le travail engagé depuis des années, avec les publics, les cinéastes, les scolaires... Il va falloir aussi « réparer » ce qui a été cassé durant notre absence en renouant des partenariats avec certaines institutions comme Périphérie ou le Collège international de philosophie dont nous étions, avant mon départ, la salle référente …
Il faut aussi relancer la fréquentation et la politique d’animation du Méliès donc on fera sans doute un festival de rentrée avec l’association des spectateurs  Renc’art au Meliès au cours duquel on va tâcher de présenter pas mal de films en avant-première ! Mon vrai désir maintenant c’est d’ouvrir le nouveau Méliès, un projet que je porte depuis dix ans et dont l’aboutissement le succès vont, je l’espère, dépasser le scepticisme de ses détracteurs. »

Epilogue
Au delà de l'histoire d'une édile qui a préféré mettre en péril le précieux outil d'éducation populaire qu'est le cinéma Le Méliès plutôt que de voir quelqu'un d'autre qu'elle en tenir le manche, c'est surtout celle d'une promesse tenue. Fait assez rare pour être souligné, l’homme politique nouvellement élu à la tête de la ville ne s’est pas contenté d’entériner une situation provoquée par l'ancienne maire en utilisant des méthodes n'honorant guère ceux qui les emploient. Un acte politique de très bon augure pour  la politique culturelle montreuilloise !
Enfin, si le scénario de cette saga d’un an et demi qui a vu s’affronter le directeur du Meliès et ses soutiens à une municipalité, verte de rage face à sa popularité et déterminée à sa perte, le tout sur fond de harcèlement, calomnies et coups bas en tous genre…est hélas devenu presque banal, le dénouement de cette « sale histoire » est, pour le coup, assez exceptionnel.D’ailleurs, de ce qui aurait pu rester dans les mémoires comme un « mauvais film », le réalisateur Abraham Cohen, est en train de faire un docomentaire, co-produit par la cinéaste Dominique Cabrera. Selon Stéphane Goudet  : « Ce sera un film intéressant sur le pouvoir de la parole, de la mobilisation citoyenne dans l’espace public.» On peut imaginer sans trop de risque de se tromper que l’avant-première aura lieu au Méliès !
*La gestion du Méliès va revenir à la communauté d’agglomération Est-ensemble (sous présidence socialiste) au premier juillet 2014.
**Les deux enquêtes administratives internes seront soupçonnées de partialité et la seule enquête pénale ayant réellement avancé 18 mois après une plainte contre X de la ville... est la mise en examen de Dominique Voynet pour complicité de diffamation publique.
*** « Ils sont en train de me licencier, cela va réagir fort. », cette phrase publiée sur facebook a motivé le licenciement pour faute grave de son auteur, accusé de ne pas avoir respecté son devoir de réserve, l'autre raison invoquée étant la "non dénonciation" du mode de gestion "irrégulier" de 15 séances non commerciales par an, gestion réformée depuis cette affaire par le CNC, qui a reconnu un "flottement".
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